Cette année l'Arco m'a un peu déçu, trop convenu, trop prudent peut-être. Il y moins l'esprit "là-au-moins-c'est-une-foire-où-je-peux-m'acheter-des trucs". Certes on peut trouver des papiers qui démarrent à quelques centaines d'euros, mais de plus en plus de galeries en vogue viennent avec des œuvres type Tàpies ou Miró et là, on ne joue plus dans la même courre. En fait je trouve que cette année l'Arco a perdu un peu de son âme en ressemblant à beaucoup d'autres foires avec des œuvres pas toujours aussi intéressantes. Bon assez critiqué car je n'aurai plus mon passe VIP et je serai très triste;)
Donc c'était quand même pas mal. Ci-dessous une petite selection et, comme d'habitude bien sûr, la rubrique foutage de gueule.
Ma première découverte est ce peintre espagnol, Secundino Hernández (1975) qui semble être la nouvelle coqueluche depuis qu'il est entré dans la collection Rubel (elle-même exposée à Cuidad l'an dernier). Il est vrai que son travail apparaît comme une nouvelle écriture presque abstraite et pourtant non figurative. Secundido essaye constamment de faire se rencontrer le monde réel et l'œuvre d'art elle-même. Pour cela il s'inspire de Miro, Dali ou Magritte et revisite constamment l'histoire de l'art. Ce que j'ai vu de son travail est bien, plein d'énergie, mais je suis impatient de suivre son évolution dans 10 ans. A ce stade je n'ai aucune certitude.
Secundino Hernández
Le moins cher (22 000 euros) et mon préféré. Untitled 2013 Galerie Forsblom
Le plus cher (38 000 euros) et le plus grand Sin Titulo 2013 Galerie j'ai oublié, désolé
Le plus "l'acheteur veut pas dire combien il a payé". Untitled 2013 Galerie Mendes Wood
Joana Vasconcelos
Désolé, je n'ai pas pris les référence mais me je souviens que le vert à gauche était à 75 000 euros. Les deux de droite ("Ebro" 2013 et "Olival" 2012) proviennent de la galerie Horrach Moya. Depuis qu'elle a été exposée à Versailles et que Pinault l'achète, sa cote flambe. Privilégiez les galeries espagnoles qui sont moins chères (je vous mettrais en contact avec une très bonne galeriste, Patricia, si vous voulez).
Le prix d'une grenouille peut varier de 30% à 50%, celui d'un chien du simple au double. J'adore son travail et, même s'ils vont continuer de grimper, je suis sceptique sur la fermeté de ses prix sur le long terme
Les coups de coeur de myFactory
Nala Yrtmaç Disastercity V 2012. Petit prix de 4 000 euros pour cette toile de 100 x 100. La Turquie est le pays à l'honneur cette année.
Ekrem Yalçindag. Voici une des oeuvres que j'ai préférée. Vous pourrez retrouver cet artiste à la Bienale d'Istambul qui se tiendra à l'automne 2013
Carlos Aires. Depuis quelques années nous étions habitués aux vinyles découpés au laser. Il s'en prend maintenant au pognon. Une autre façon pour le collectioneur d'afficher ses richesses. En tout cas le résultat est plutôt bien.
Kendell Geers. "Beautyisnotenough", Ca peut être le cas d'une jolie fille, souvent celui d'une oeuvre d'art. Malheureusement déjà vendu pour 5 000 euros
Peter Callesen. Cet artiste manie le crayon et le cutter à la perfection. A voir en ce moment aussi à la Citée de l'Architecture à Paris, jusqu'au 17 mars 2013
Robert Yarber "The Collapse Of The Now Could Not Have Come At A Better Tim (je n'ai pas oublié le "e") 2012
Robert Yarber "Alaways Already" 2010
Shiaru Shiota: une de mes artistes favorites. Ce magnifique kimono est présenté à 50 000 euros. A mon sens une pièce muséeale. Si l'un ou l'une d'entre vous veut me l'offrir pour mon anniv je ne dis pas non;)
Oleg Dou. Ce ne sont pas mes portraits préférés mais j'adore son travail.
Gullermo Rubi (+ détail)
Juan Genoves. Voilà un artiste dont le travaille m'étonne à chaque fois. J'adore. Cela valait déjà une tone il y a 3 ou 4 ans, dans les 30 à 40 000 euros. Cette année on m'en demandait 156 000 euros! Une paille
Richard Estes "Brodway & 68th street" 2012. Vu aussi dans la collection Thyssen (Madrid). 460 000 euros seulement
Julian Opie. Les mêmes yeux, la même bouche, le même nez...et pourtant 3 portraits différents. Le maître de la ligne claire après Hergé
Marcos Castro
Enrique Radicales "Souvenir file000325.tiff" 2013
Jorge Mayet Sans Titre 2011. Installation en papier mâché et plumes. Toujours aussi poétique
Les "Me Too"
Thomas Locher "Marx/Capital (This Formulae Which)" 2011
José Davila Horizonte vertical, 2012
Pablo Jansana "W1 & B1" 2012
J'instaure cette nouvelle rubrique des "Me Too" car piquer son inspiration chez les autres c'est une chose, mais faire pareil en moins bien c'en est une autre. Pour autant j'avoue que le Jansana m'a bien plu. Si, après avoir payé la pension alimentaire, l'école des marmots et tout le bazar, il me restait 11 000 euros dont je ne sauraif vraiment pas quoi faire, je l'aurais sans doute acheté. Donc, ici on ressent quand même très fort les influences de Richard Prince, Donald Jude et Steven Parrino (mort en 2004 et très remarqué au Palais de Tokyo dans l'expo La Marque Noire)
Des trous, des p'tits trous, toujours des p'tits trous
Jorge Perianes Untitled et Untitled. Ne peuvent s'acheter que sur internet ici: Paddle8
Ricardo Rendon "Area de Come" 2012 et détail: Si mon espagnol n'est pas top, je comprends quand même que le galeriste a peur qu'on foute l'oeuvre a la poubelle. Il a raison d'avoir peur
Miguel Rotschild vu aussi à Paris Photos 2012
Pierre Bismuth "Something less Something More" 2010. Je ne suis pas très bon en math mais à mon avis le résultat est négatif. Un mauvais présage pour un pannier percé qui voudrait se l'offrir?
Les presques foutages de geule, mais en fait non
Anibal Lopez (né en 1964 au Guatemala). De loin on pense à des terres cuites faites par des écoliers guatemaltèques et on se dit "So what?" De près, on s'aperçoit qu'il s'agit de braquages qui tournent au bain de sang. La video projetée derrière est une intervention en direct de l'artiste à Documenta (Kassel) l'an dernier. En réalité il s'agit d'un tueur à gage recherché évidemment, qui parle de son métier comme le ferait n'importe qui avec un métier "normal" (j'ai pas dit comme Monsieur Normal). C'est bien sûr extrêmement déstabilisant. Je confesse ne pas avoir vu la video en entier et le regrette. Mais se pose ici la question: peut-on juger une oeuvre indépendamment de son créateur? Pensez aux dessins d'Hitler (repris en partie par les Chapman Brothers afin de le "ridiculiser"), ou aussi à "Voyage au bout de la Nuit", chef d'oeuvre littéraire écrit par une pourriture.
Francesco Tropa "Cigarra" 2001. Dès que j'ai vu cette pièce je me suis qu'elle était une candidate direct pour la rubrique "Foutage de gueule". Mais en fait, non. La cigarette, celle qui tient debout, eh bien elle est en or massif. A partir de là, plein de points de vue peuvent s'affronter sur le sens de l'oeuvre et ça, c'est bien.
Eduardo T. Basualdo Water Glass, 2012. Pareil pour cette oeuvre: un verre d'eau sur un frigidaire? non mais! on se croirait à Basel! En réalité à l'intérieur un moteur ébranle le frigidaire faisant trembler le verre et son contenu. A la seconde où il va se renverser il revient dans sa position initiale. Entre temps chacun a pu analyser sa réaction et s'interroger sur une peur peut-être irrationelle qu'il a pu éprouver. On achète cette oeuvre pour cette nano seconde d'incertitude. A voir à la galerie PSM
Eduardo T. Basualdo roulette, 2011. Il s'agit ici d'une roulette qui ne s'arrête jamais. Eduardo rend un instant normalement fugace et d'une extrême tension (va-t-on perdre, gagner?), interminable. C'est une façon d'arrêter le temps avec un objet pourtant en action.
Les foutages de gueule
Si une oeuvre me parait outrageusement chère pour ce qu'elle représente, elle aura naturellement sa place dans cette rubrique.
C'est le cas par exemple du "Waiting for Jerry" de Juan Muñoz. L'intallation est plutôt marrante: une pièce aux murs blancs, vide, et juste l'apparence d'un trou noir (il est peint et non creu) par lequel Jerry est supposé sortir ou rentrer. C'est le négatif de l'installation présentée au MoMA en 2007, la pièce était noire, le trou écclairé (et il y avait la B.O. du dessin animé en fond sonore).
L'installation du MoMa était à l'attention de sa fille, celle-ci est à l'attention de son fils Franceso. Là où les bras m'en tombent c'est quand la galeriste explique avec un air légèrement condescendant que pour 100 000 euros vous achetez un concept. Qu'en penseraient les 274 enfants qui pourraient se nourrir pendant un an avec cette somme?
Conclusion, s'il est interdit de breveter une idée, rien n'empêche de se ruiner pour un concept.
Abdel Abdessemed est un artiste algérien qui vit et travaille en France. Son oeuvre est dans les grands musées (Pompidou, Mamco) et les grandes collections (Pinault). Ici un cheval en polyuréthane sur le livre vert de Kahdafi. Ce livre qui prône une alternance au capitalisme. Pas l'artiste: la galeriste en demande 80 000 euros justifiant son prix par son refus d'accéder aux demandes de l'artiste qui en voulait 100 000. Là Abdel tu pousses un peu quand même.
Maurizio Cattelan Untilted (Zorro) 1998 35 cm x 27 cm Acrylic on canvas. On est très loin de la météorite sur le pape qui est sans doute une de mes oeuvres préférées. Cette pièce aurait pu avoir sa place dans la rubrique des "Me Too" en raison de son inspiration Fontana-iesque, mais les 190 000 euros que demandent la gallerie, c'est quand même du vol en plein jour. Non?
Kamen Stoyanov, Tomato Plants in White Cubes. 10 000 euros pour 4 plants de tomates dans des bacs formés de canvas sous cellophane, assortie d'une video où l'artiste donne sa recette de la sauce bolognaise. Dire que Warren Buffet a dépensé 24 milliards de dollars pour racheter Heinz. Tout s'explique, la cote de la tomate s'envole comme celle de Farmville le jeu sur Facebook dont l'oeuvre s'inspire.
Miroslaw Balka 2011 "180 x 114 x 145": Quel génie, le titre de l'oeuvre correspond aussi à ses dimensions! Est-il besoin d'expliquer pourquoi cette sculpture se retrouve dans la section foutage de gueule?
Abraham Cruzvillegas. Ces "oeuvres" sont composées de matériaux trouvés sur les chantiers et évoquant pour l'artiste la construction de la maison familiale. J'ai retrouvé une de ses citations "L'efficacité capitaliste ne s'est pas révélée la meilleure stratégie pour les productions culturelles". Alors pourquoi tu vends un balais de chiottes 12 000 euros et les autres trucs entre 30 et 40 000 euros?
Ici, je voudrais mettre en avant des foutages de gueules un peu plus pernicieux car ils ne sont pas chers comparés aux précédents. A few "G's" only.
Pep Duran Construction per fondre dos 2007 : 5 000 euros. L'artiste cartonne apparement (cette oeuvre était déjà reservée). Qu'en penseraient les ouvriers du bâtiment ruinés par la bulle immobilière espagnole?
Lopez. Non mais franchement?
J'ai perdu les références de cet artiste. Voici le pitch: Il a trouvé des rollers dans la rue ainsi que deux cannes. Il a considéré que les cannes avaient appartenu à un couple maintenant décédé. Et il redonne la vie en créant des jambes dans des rollers. Non mais sérieusement? faut arrêter de fumer la moquette. 2 500 euros.
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