Si vous ne connaissez pas encore Zevs, c'est le moment ou jamais de s'intéresser à son travail d'autant qu'une magnifique monographie aux editions Alternatives (Zevs et Tokke Lykkeberg) sortira en septembre 2014 (100 exemplaires collectors sont vendus durant le vernissage alors magnez-vous). Sous le commissariat de Stéphane Chatry et la complicité bienveillante de Patricia Dorfmann, sa galeriste pendant 10 ans, Zevs revient en force à La Vitrine am pour sa première solo depuis 7 ans.
Zevs est de ces artistes qui font la passerelle entre la rue et l'art contemporain. Durant ces 20 dernières années il a pris un nombre de risques incalculables et incalculés lors de ses interventions en milieu urbain. Son nom est celui du RER qui failli lui passer dessus il y a un quinzaine d'années. Durant son riche parcours il a fait de multiples interventions complètement barrées (comme "Visual Kidnapping-Pay now" qui consistait à découper un poster géant de Lavazza puis demander une rançon de 500 000 €, dont la remise sera orchestrée au Palais de Tokyo). Sa marque de fabrique c'est aussi les "Liqidated logos". En 2009, à Hong-Kong il se fait gauller entrain de faire un liquidation du double C de Chanel et passe quelques moments au ballon pour dégradation de bien public.
Le génie de Zevs est d'avoir su intellectualiser sa démarche et nourrir une réflexion sur notre société dominée par les world companies. Nous sommes dans un monde où l'image domine. L'art de Zevs par ses détournements est de troubler le message original et ainsi de marquer les esprits avec force. A l'instar du "u" de Zevs muté en "v", l'expo est assez pointue. Tout d'abord le papier rayé jaune et noir est une liquidation des bandes de Buren. A regarder de plus près on découvre une dizaine de jaunes différents. Certes il y l'éternel jaune et noir de sa signature (inspiré du signal danger sur les panneaux EDF, retourné, les éclairs formant son blaze). Mais il y aussi le jaune Ikéa, le jaune de la Poste et ainsi de suite. Les photos à plat sur les quatre piedestals retracent ses liquidations. Elles sont organisées comme un échiquier afin de restituer la partie que joue l'artiste avec les marques. Rappelons par exemple que sa première liquidation de Nike lui a valu un T-Shirt commercialisé...par Nike. Je précise sans son consentement bien sûr car Zevs est artiste sans concession. Qu'on l'autorise à pratiquer son art ou qu'on le sollicite et le voilà qu'il cessera immédiatement de se produire. Sans subversion, sans interdit, son travail ne serait plus le même et il tomberait dans précisément ce qu'il s'efforce de fuir. Enfin, le clou du spectacle est la divulgation pour la première fois depuis leurs enregistrement en 1998, de conversations téléphoniques que Zevs a eu avec des galeristes. Il a peine 20 ans et appelle les galeries pour leur demander comment de venir un artiste, comment faire partie de l'écurie. Les réactions sont attendues bien sûr, en gros, va chier. Une des femmes propose qu'il revienne la voir un jour quand il aura quelque chose à montrer ce qu'il fait avec virtuose dans sa performance. En 5 mn Zevs va contracter le temps (symboliser peut-être par l'éclatement de sa montre frappée de son chiffre). Il y quinze on l'envoie péter, aujourd'hui c'est lui qui pète tout. Peu nombreux sont les artistes qui peuvent avoir une affirmation de soi avec un tel talent. Zevs ne vit pas de l'art, il vit l'art.
Orlan | Zevs, Orlan |
Orlan, Elphège | Stéphane Chatry, Zevs | La moitié du Team Thalys autour de Patricia Dorfmann |
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La performance de Zevs: durée 3'59'' (Cliquez sur l'image pour visionner) Video filmée par Elphège pour myFactory.net. (Image du Flyer Crédit La Vitrine am) |
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